Des années 1950 à nos jours, l’histoire du Lockheed F-104 Starfighter…
Depuis les débuts de l’aviation, des dizaines de milliers de types d’avions ont vu le jour. Certains n’ont pas dépassé le stade du prototype, d’autres ont connu une production importante. Certains réputés, d’autres oubliés. D’autres encore ont marqué leur époque en effectuant un « saut » technologique ou en innovant dans un domaine précis. Ainsi, s’il fallait ne retenir que quelques avions pour synthétiser l’histoire de l’aviation, il faudrait sans aucun doute citer des appareils tels que le Flyer I, le Blériot XI, le Mustang, le Messerschmitt 262, le Mirage III, le F-16, l’A-320, le Concorde ou encore le SR-71. Dans cette liste, il faudrait assurément y glisser le F-104 Starfighter…
Il faut se rappeler qu’en 1954, quand le prototype a effectué son premier vol aux mains de Tony Levier, l’intercepteur était à la pointe du savoir-faire technique, avec ses ailes minces (3,3% d’épaisseur relative), courtes et droites (allongement de moins de 2,5 !) lui ayant octroyé le surnom de « missile avec un homme à bord » mais aussi de « Zipper » (fonceur). René Francillon, auteur aujourd’hui disparu, détaille dans la première partie de cet ouvrage, sorti fin 2017, la genèse de cet intercepteur conçu au sein des Skunk Works de Kelly Johnson, à Burbank, Californie.
Pour les prototypes XF-104 (dont un certain nombre fut perdu lors des essais constructeurs ou sauvé après un encadrement effectué réacteur éteint…), les YF-104 de présérie et les premiers F-104 livrés à l’US Air Force, le Starfighter se distinguait de plus par un siège éjectable fonctionnant… vers le bas. Les ingénieurs de Lockheed avaient eu en effet des doutes sur l’efficacité du système à poudre pour éjecter le siège vers le haut à grande vitesse (Mach 2) tout en évitant au pilote le choc avec l’empennage en T… On reconnaissait alors les pilotes de F-104 à leurs éperons de cow-boy destinés à bloquer leurs jambes lors de l’éjection !
Ainsi, le Starfighter fit partie des chasseurs emblématiques de la Guerre froide, aux côtés des Mirage III, F-4 Phantom et MiG-21. Mais prévu au départ pour grimper haut et vite par ciel clair, le F-104 ne connaîtra qu’une courte carrière aux Etats-Unis, passée en revue au fil des pages, de l’US Air Force à la National Air Guard sans oublier quelques F-104 transformés en cibles volantes. Dans la durée, sa carrière se déroula surtout à l’étranger, avec 1.500 exemplaires – sur les 2.500 et quelques Starfighter produits – construits sous licence dans divers pays européens et au Japon.
Avant le F-16 et désormais le F-35 « imposés » par les Etats-Unis à des « partenaires » industriels, le F-104 fera en effet partie des flottes de plusieurs forces aériennes – scandales multiples de corruption compris au passage – et notamment pour une mission non prévue à son origine, celle d’un vecteur de frappe nucléaire tactique à très basse altitude, qui plus est dans des conditions météo marginales bien différentes du ciel bleu de Californie… Le monoréacteur connut ainsi un taux de pertes lui valant une mauvaise réputation, même si l’auteur souligne que le taux d’attrition du F-104 en opérations est resté comparable à d’autres types utilisés dans des conditions similaires.
Les différents utilisateurs du F-104 sont ainsi présentés pays par pays (Allemagne, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, Italie, Grèce, Japon, Jordanie, Norvège, Pays-Bas, Pakistan, Taiwan, Turquie – autant de pays « clients » justifiant le terme de « contrat du siècle ») avec les unités utilisatrices et un photoscope permettant de découvrir le Starfighter sous des livrées très diverses. L’Italie sera le dernier utilisateur du type avec un retrait de ses Starfighter intervenu en 2004.
La dernière partie de l’ouvrage concerne les F-104 utilisés dans le domaine… civil, dont le principal utilisateur sera la Nasa qui s’en servit pour divers essais mais aussi comme « chase-plane » pour accompagner des prototypes de différents programmes. Mais il faut également citer la tentative de record de vitesse et d’altitude menée par l’ex-pilote d’essais de Lockheed Darryl Grenameyer, ou encore la société Starfighter Aerospace. qui propose de nos jours des vols de découverte à bord du jet bisonique !
Rajoutons à cela les récits de divers pilotes, des plans 3-vues des différentes versions, 48 profils en couleur signés Thierry Dekker, un écorché, une riche iconographie (680 photos)… et vous aurez compris que cet ouvrage de 350 pages constitue une présentation très complète de l’étonnant Lockheed F-104 Starfighter à l’historique controversée… ♦♦♦
Photos © Lela Presse, Nasa, US Air Force, T. Dekker, Starfighter Aerospace
– « Lockheed F-104 Starfighter, l’histoire controversée du Zipper », par R. Francillon. Profil Avions n°26. Lela Presse. 352 p. 55,00 €.