Edition spéciale pour le monomoteur qui a dépassé les 18.000 unités…
Au départ de Wichita, le 22 décembre 1945, le pilote d’essais Vern Louis Carstens effectuait le premier vol du Model 35 de Beechcraft, baptisé Bonanza (filon de métal précieux…). Cinq prototypes ont été construits, les deux premiers servant aux essais statiques. Le premier à prendre l’air sera ainsi le NX80150, la cellule n°3. Avec son empennage en V au dièdre de 30°, l’appareil dénote dans le domaine du monomoteur, étant destiné à prendre la suite du précédent monomoteur également étonnant, le Model 17 Staggerwing.
Le programme ne se déroule pas sans problème car l’un des trois prototypes est détruit le 26 octobre 1946, l’accident entrainant la mort du pilote Harry Lawrence Reiter. Lors d’un essai en piqué pour valider la Vne, une trappe de train principal se détache, augmentant la pression aérodynamique dans la baie du train allant jusqu’à la rupture de l’aile. Le V-35 reçoit cependant sa certification en mars 1947 et la production du quadriplace à train rentrant, de construction métallique, démarre.
Le prototype NX80150 a reçu un Lycoming O-290A, un 4-cylindres à plat développpant 130 ch à 2.800 tr/mn (5 minutes maximum) puis 125 ch à 2.600 tr/mn. Le quatrième prototype (NX80040) et la série recevront un Continental E185, un 6-cylindres à plat développant 165 ch à 2.050 tr/mn avec une hélice bipale à pas variable.
Avec 660 kg à vide pour 1.155 kg à la masse maximale, le V-35 atteint la vitesse maximale de 295 km/h, croisant à 280 km/h au FL100. Avec les pleins (150 litres), l’a distance franchissable atteint les 1.200 km. Le Model 35 va connaître le succès, devenant l’avion de l’homme d’affaires américain se déplaçant rapidement pour aller voir ses clients, un chantier. Dans les années 1980, à la suite d’un certain nombre d’accidents dus au vieillissement des structures, les empennages du V-35 seront renforcés alors que Roy LoPresti s’occupe du bureau d’études. Le V35 sera produit de 1947 à 1982, année où Olive Ann Beech a pris sa retraite – elle avait pris la tête de la société après la mort de Walter au début des années 1950 tandis que la société passait de 1.000 à… 10.000 employés !
Si le V-35 est performant, il a ses particularités, notamment le fait de « bouchonner » dans la turbulence avec un « roulis hollandais » qui n’est pas forcément agréable pour les passagers. Le bureau d’études de Beech va développer un appareil à empennage classique, baptisé un temps Debonair mais l’image du Bonanza est telle que tous les appareils seront baptisés Bonanza jusqu’à nos jours, tandis que le premier Bonanza a été vendu 15 ans après les débuts de la société, créée par Walter et Olive Ann aient créé la Beech Aircraft Company à Wichita, au Kansas.
Aujourd’hui, le G36, ultime version de la série, est toujours en production à Wichita, avec une poignée d’exemplaires sortant chaque année des chaînes d’assemblage. Au total, c’est 18.000 Bonanza qui ont vu le jour, un record pour ce segment de marché. Aux côtés des Model 17 Staggerwing, du bimoteur Model 18, le Model 35 fait partie des succès de la firme implantée à Wichita, Kansas. Le Bonanza donnera naissance par la suite au bimoteur Model 58 Baron.
Pour fêter les 75 ans passés depuis la commercialisation en 1947 du premier Bonanza 35, Beechcraft annonce une version spéciale disponible en 2022. Le propriétaire du constructeur de Wichita, le groupe Textron, affirme que le Bonanza est « l’avion dont la production continue est la plus longue de l’histoire ».
Même si la capacité d’emport (6-places), la puissance installée (Continental 285 puis 300 ch avec hélice tripale), les dimensions (allongement du fuselage notament), les performances(176 Kt de croisière maximale, 920 nm de distance franchissable, 500 kg de charge utile, plafond de 18.500 ft), le tableau de bord (G1000 NXi), les doubles commandes (et non pas le volant basculable aux places avant) font que le G36 actuel n’a plus rien à voir avec l’historique V-35, la marque demeure, prouvant au passage que l’aérodynamique subsonique était déjà bien maîtrisée à la fin des années 1940. Côté qualités de vol, le Bonanza propose un excellent niveau apprécisé de ses pilotes et validé par les commentaires de pilotes d’essais comme Jean-Marie Saget ou Jean-Loup Chrétien. ♦♦♦
Photos © Beechcraft, San Diego Air & Space Museum