Pour ou contre la Liste minimale d’équipement (LME) ?
La LME est la « Liste minimale d’équipement » nécessaire pour pouvoir réaliser un vol, acronyme français de la MEL ou « Minimum Equipment List ». Ainsi, une LME contient « des items liés à la navigabilité ainsi qu’aux exigences opérationnelles pouvant être inopérants ou manquants » sur l’appareil utilisé avant le début du vol « sous réserve du respect de certaines conditions permettant d’assurer un niveau de sécurité satisfaisant ».
Le concept de LME permet ainsi de pouvoir continuer à utiliser un avion avec certains instruments, équipements ou fonctions inopérants ou manquants, et ce pour une période limitée (durée variable selon la « gravité » des conséquences) jusqu’à ce que la réparation puisse être réalisée. Il ne peut s’agir évidemment de dévier d’une consigne de navigabilité ou de toute autre exigence obligatoire. Pour l’aviation commerciale, la LME est définie par le constructeur, une compagnie pouvant en théorie rajouter ses propres items.
Il faut rappeler que toute panne constatée lors d’un vol doit faire l’objet d’une inscription au carnet de route de l’avion, dans la colonne Observations. L’équipement ou système concerné est alors réparé avant le vol suivant ou sa remise en service est reportée sur la base de la LME. Dans ce cas, tout instrument, équipement ou fonction inopérant, dont la réparation est reportée, doit être ensuite clairement identifié physiquement pour le pilote comme « inopérant », généralement par une étiquette figurant sur le tableau de bord à proximité ou sur l’instrument ou l’interrupteur concerné.
Et ceci doit figurer sur le carnet de route dans les observations. Les pilotes en prennent ainsi connaissance et doivent indiquer… avant le vol dans la colonne Remarques/Observations que « l’item a été pris en compte, selon LME », avec les possibles limitations d’emploi associées telles que listées dans la LME. À l’issue du vol, si aucune autre panne ou anomalie est constatée, la mention « RAS » pourra être ajoutée pour le vol réalisé. Tel est le principe d’une Liste minimale d’équipement, concept employé dans l’aviation commerciale.
Mais certains clubs l’ont appliqué en aviation légère, en définissant une LME passant en revue tous les équipements et systèmes opérationnels sur leurs différents appareils, selon un formatage comprenant quatre colonnes : la première identifie l’instrument ou le système, la seconde précise le nombre d’items à bord, la troisième le nombre minimum requis et la quatrième définit les conditions d’emploi ou complète par des remarques. Ainsi, un instrument ou un équipement pourra ne pas impacter un vol diurne (exemple : phare d’atterrissage) mais interdira un vol de nuit.
On constate si l’on s’appuie sur une recherche via internet que ce sont des « gros » clubs qui ont décidé de mettre en place une LME, avec une approche « aviation commerciale » appliquée à l’aviation générale. La majorité des monomoteurs en catégorie ELA1 n’ont pas de LME définie par le constructeur. Il s’agit donc de LME établies par l’exploitant selon un guide générique. Certains NoGo sont tellement évidents (altimètre inopérant, non verrouillage des sièges avant, compensateur hors service) qu’ils doivent cependant être… inscrits. D’autres peuvent ouvrir à débat !
En effet, une LME une fois définie doit être « déclarée » à la DSAC/IR locale (celle-ci en prend note par accusé-réception mais ne l’analysera pas, le contenu restant de la responsabilité de l’organisme), la LME doit se trouver à bord de l’appareil, dans le manuel de vol, et être appliquée. Et c’est là que des contraintes peuvent intervenir car une même panne peut parfois ne pas être traitée de façon binaire (Go ou NoGo) selon différents facteurs. Cela peut dépendre en effet de l’expérience du pilote, des caractéristiques de l’aérodrome de départ et d’arrivée, de la durée du vol envisagée pour revenir au terrain de départ, surtout si l’aérodrome où est survenue la panne ne bénéficie pas d’un atelier pouvant intervenir…
Ainsi, on peut se poser la question d’un NoGo catégorique trouvé pour certains cas dans des LME – sur la base d’un unique vol de convoyage s’entend, afin de ramener l’appareil vers son terrain d’attache ou celui de l’atelier qui l’a en charge… – comme :
– non-fonctionnement des volets : on peut supposer une panne électrique et si les pistes ne sont pas limitatives, décollage et atterrissage peuvent se faire en lisse sauf mention contraire du manuel de vol.
– panne d’anémomètre : là encore, un retour à son terrain d’attache doit être possible sauf conditions particulières (piste limitative, montée particulière, etc.) sinon, après l’impact d’un insecte à l’arrivée d’un voyage, avec obstruction de la prise totale, il ne sera plus possible de revenir à son point de départ car la LME indique NoGo pour le vol suivant.
– avertisseur de décrochage : certes l’appareil a été certifié avec cet équipement opérationnel mais dans le cadre d’un unique vol pour revenir au terrain de base, cela doit pouvoir se faire sans cet avertisseur, qui n’est d’ailleurs pas présent sur certains appareils (CNRA notamment).
– panne d’alternateur : on pourrait encore citer ce cas où, si la durée du vol n’est pas suffisante pour décharger totalement la batterie, le non-fonctionnement de l’alternateur peut se concevoir pour un simple convoyage technique.
Parmi les NoGo que l’on trouve encore dans certaines LME d’aéro-clubs figurent l’absence de jeu de fusibles à bord ou encore l’absence du détecteur de monoxyde de carbone, alors que cette dernière présence – même si elle est fortement recommandée – n’est pas une obligation réglementaire. À la descente de l’appareil à destination, le passager accroche le détecteur de monoxyde et le casse, c’est alors NoGo pour le retour quelques heures ou jours plus tard… Ce peut être aussi un NoGo en cas de « lampe bas niveau hors service » alors qu’un plein complet dudit réservoir serait plus opérationnel dans le cas d’un vol n’exigeant pas la totalité de son contenu…
On le voit, même si la FFA recommande « fortement aux aéro-clubs n’ayant pas encore recours à cet outil favorisant la sécurité des vols de s’y intéresser », la LME peut apporter d’importantes contraintes opérationnelles, pas toujours justifiées (selon expérience du pilote, durée du vol, impact de la panne, statut de l’aérodrome, espace aérien, etc.) mais retenues pour leur « plus petit dénominateur commun » maximisant la sécurité des vols dans un cadre collectif… On peut penser que l’usage du bon sens pourrait être également utilisé pour gérer certains traitements de pannes.
Heureusement, une LME n’est… pas obligatoire pour les DTO et ATO utilisant avions et hélicoptères « non complexes », dans le cadre de la Part NCO (Non Commercial Operations). Par contre, si un organisme de formation décide d’en utiliser une pour ses appareils, il y a alors obligation de déclaration d’une LME à sa DSAC/IR via un formulaire relatif au NCO.GEN.155 mais sans fournir la LME. ♦♦♦