
Un autre cas où la « machine » s’emballe sans voir qu’elle se décrédibilise…
Tout commence pour ce pilote par un vol le 11 juillet 2025 depuis sa plate-forme habituelle, avec un service du contrôle aérien actif. Aux commandes de son biplace de construction amateur, motorisé par un groupe PSA diesel, peu après le décollage il constate une montée anormale et rapide de la température du circuit d’eau du moteur, l’indicateur indiquant plus de 120°C. Par mesure de sécurité et en contact avec la tour de contrôle de Béziers-Vias, il effectue aussitôt un atterrissage, le tout sans dommage majeur.

Mais le pilote se dit alors dans « un état de stress et de choc important », sa priorité ayant été d’assurer sa sécurité, avec un moteur qui n’était plus refroidi puis, une fois au sol, de chercher à identifier la cause technique de cette surchauffe. C’est dans ce contexte qu’il va par la suite omettre d’inscrire ce vol de 10 minutes dans le carnet de route de l’appareil, sans intention de dissimulation puisque la tour de contrôle a été témoin de l’incident. À l’analyse du groupe moto-propulseur, il va s’avérer par la suite que le joint de culasse a lâché et que la sonde de température a grillé, confirmant bien la nécessité d’un atterrissage d’urgence.
Le 2 septembre suivant, après intervention sur l’appareil, vérifications et contrôles divers, le pilote effectue un tour de piste de « test » pour s’assurer du bon fonctionnement du moteur,
sa concentration se portant entièrement sur la surveillance des paramètres moteur et notamment la température du circuit d’eau de refroidissement. À l’atterrissage, avec une « vitesse légèrement excessive » et sous l’effet du vent de travers, il rebondit à l’arrondi et efface la roulette de nez. L’appareil est dégagé sur le train principal et remisé dans un hangar.
Dépêchée par la tour, la BGTA arrive rapidement sur place, procède à un interrogatoire et vérifie les documents durant plus d’une heure alors que le pilote se dit encore perturbé par son atterrissage et les dommages subis par sa machine. Carnet de route analysé ligne après ligne par la BGTA, il apparaît que le vol du 11 juillet n’a pas été inscrit. Reconnaissant cette omission, le pilote complète aussitôt le carnet de route avec le vol du 11 juillet et aussi celui du jour. L’omission n’avait pas de caractère intentionnel, le pilote conserve par ailleurs tous ses vols et traces sur support numérique – au passage, une mesure fortement recommandée par aeroVFR pour éviter de subir des témoignages inexacts…
Chaque pilote sait que le carnet de route doit être rempli au plus tard le jour même avant minuit (!) ou à chaque changement de commandant de bord si plusieurs se sont succédé le même jour. Mais dans le contexte de « l’atterrissage forcé » du 11 juillet, une omission peut
se comprendre surtout avec la suspension des vols de l’appareil jusqu’au « vol test » du 2 septembre. L’omission ayant été corrigée dans l’heure, sur place, en présence de la BGTA,
un simple « rappel à la loi » aurait pu être considéré comme une « gestion humaine » de la situation, dans un environnement où l’on vous parle de culture juste.
Mais hélas pour notre pilote, l’histoire ne s’arrête pas là car quelques jours plus tard, il est convoqué par la BGTA de Montpellier afin de signer un procès-verbal, reconnaissant ce « manquement » et s’entendre dire qu’il peut être assisté par un avocat. Le pilote a souligné que ce manquement était dû à un atterrissage d’urgence suite à une panne moteur due à une surchauffe anormale et qu’il était alors plus occupé à régler le problème mécanique qui aurait pu être fatal. La rédaction du PV a duré près d’une heure…
À la sortie de ce second interrogatoire, le pilote s’est décidé à écrire au directeur de la DSAC Sud, « vivant très mal la situation ». Guettant chaque jour sa boîte aux lettres en attente d’une réponse à son courrier recommandé, il attend toujours une réponse – l’indifférence… – mais ce 31 octobre, il a eu droit à un coup de fil de la BGTA, le convoquant prochainement à leur bureau afin de prendre rendez-vous avec… un délégué du procureur de la République pour une prochaine audience afin de statuer sur son sort…
Alors que l’on nous parle depuis quelques années – avec un « certain retard » par rapport aux pratiques dans le monde anglo-saxon – de l’importance des compétences non-techniques, des facteurs humains, de la gestion du stress, de la culture juste, ce pilote, n’ayant jamais eu d’infraction aéronautique, « vit très mal la situation, jugeant le traitement disproportionné »,
le considérant « presque comme du harcèlement moral ». Depuis un mois, il a suspendu ses vols, une interruption néfaste si l’on évoque le nécessaire maintien des compétences et l’importance de l’expérience récente – bref, le « système » dans ses actes va à l’encontre de ses propos. Vous avez dit schizophrénie ?
Pour une seule ligne d’écriture omise sur un carnet de route, il attend le prochain rendez-vous de la BGTA puis le passage par le tribunal pour savoir s’il arrête définitivement les vols et procède à la vente de son appareil… La disproportion du traitement infligé pour un tel point de réglementation, ne remettant pas en cause la sécurité de vols, dans les conditions évoquées, confine au dysfonctionnement de la justice, au moment où des délinquants en col blanc ayant commis des actes illégaux et/ou frauduleux évitent un procès pendant plus d’une décennie… La justice est déjà surchargée sous les montagnes de dossier mais procureur, juges et avocats vont perdre du temps à traiter d’une ligne sur un carnet de route sans avoir la moindre culture aéronautique pour en comprendre les enjeux, simplement « conseillés » ou « orientés » par les extrémistes de la Réglementation au détriment de l’aspect humain.
En aviation générale, en France, on vit dans un monde de fous ! ♦♦♦
Ndlr : il y a plus de 25 ans, le chef-pilote d’un aéro-club avait été embarqué un soir depuis
son domicile dans un véhicule de la gendarmerie pour aller signer un procès-verbal au commissariat suite à l’absence de quelques signatures dans les carnets de route des appareils de son association. Un article prévu pour parution dans Info-Pilote avait reçu alors le véto du président de la FNA à l’époque.