
Un rapport d’enquête de l’AAIB…
Un rapport de l’AAIB (le BEA britannique) analyse l’accident d’un Cozy Mk IV survenu en finale 09 à Goucestershire Airport quand le moteur a perdu sa puissance, entraînant un atterrissage avant la piste, la trajectoire finissant dans les antennes de l’ILS. La cause de l’accident est la dégradation et la contraction du collecteur d’air réalisé en imprimante 3D.
Ce 18 mars 2025, le quadriplace de formule canard, à motorisation propulsive, est de retour d’un vol local, effectué au FL080. Il est en finale 09 et le pilote a l’intention d’effectuer un touché-décollé. L’aéro-frein ventral est déployé. En courte finale, vers 500 ft sol, le pilote souhaite augmenter la puissance mais il comprend rapidement que le moteur a totalement perdu sa puissance. Il survole une route et des arbustes marquant les limites de l’aéroport
et atterrit avant la piste dans les installations de l’ILS. Le pilote est légèrement blessé, l’appareil détruit.
En 2019, une demande de modification avait été déposée par le propriétaire auprès de la
Light Aircraft Association (LAA, équivalent anglais du RSA), pour remplacer l’injecteur de carburant initial par un système d’injection mécanique. Ce système comprenait un régulateur de carburant, une pompe à carburant haute pression entraînée par le moteur, une pompe à carburant auxiliaire électrique, un régulateur de débit de carburant et les durites, filtres et raccords associés. À l’issue des essais en vol, le système d’alimentation en carburant modifié avait été approuvé par la LAA en 2022. Le système d’injection de carburant ainsi modifié avait accumulé 37 heures de fonctionnement lorsque l’accident s’est produit.
L’analyse du moteur après l’accident a montré qu’un coude d’admission d’air, en plastique,
relié au régulateur de carburant, s’est affaissé, restreignant ainsi le débit d’air d’admission vers le moteur et entraînant la perte de puissance. Cet élément avait été installé lors de la modification du circuit carburant avec une pièce imprimée en 3D. Un filtre à air orienté vers l’avant avait été fixé à l’extrémité avant de ce coude, mais il s’est détaché et a été retrouvé
dans le capot inférieur du moteur.

Le coude en question avait été acquis aux Etats-Unis lors d’un meeting, avec une pièce annoncée par le vendeur comme étant réalisé à partir de CF-ABS (fibre de carbone) en filament avec une température de transition de 105°C – température à partir de laquelle un matériau passe d’un état solide à un état plus souple. Les plans du Cozy MkIV évoquent pour ce coude une autre possibilité avec une pièce en composites faisant appel à quatre couches de tissu bidirectionnel polymérisées à l’époxy. La température de transition est alors de 84°C
– d’où le choix du propriétaire pour la pièce « américaine ». Mais les plans du Cozy révèlent
la présence d’un tube fin en aluminium à l’extrémité du coude, là où il est attaché à l’entrée d’air, élément non présent sur le coude « américain ».
L’AAIB a conduit des essais thermiques avec deux échantillons du coude pour déterminer
la température de transition. Les températures relevées pour ces échantillons ont donné seulement 52,8 et 54,0°C. En Grande-Bretagne, toute modification par rapport à des plans de construction doit être approuvée par la LAA et pour cette modification, le propriétaire du Cozy avait suivi le processus, la modification étant considérée comme mineure, avec la description des modifications faite par le propriétaire. Cette description avait omis d’indiquer la pièce en 3D et la LAA n’avait donc pu valider la qualité de cet élément. Le propriétaire n’était pas conscient du risque avec une température de transition considérée comme très élevée.
L’affaissement du coude est ainsi dû à la température du moteur. Il est possible que la sortie de l’aéro-frein ventral ait modifié l’écoulement en créant une dépression dans la partie
basse du capot moteur, envoyant de l’air chaud sur la pièce en question. La LAA a l’intention
de publier une « Alerte » concernant l’usage d’éléments réalisés en 3D à l’intention de ses inspecteurs assurant les visites de contrôle.
Moralité de l’histoire :
– Un petit élément peut avoir de grandes conséquences.
– Toute modification par rapport à un processus déjà validé mérite une bonne analyse.
– Une pièce réalisée en 3D doit être testée pour confirmer qu’elle possède les mêmes caractéristiques que la pièce initiale, sans se fier forcément aux propos d’un vendeur… ♦♦♦
Photos © DR, AAIB